Né à Gênes le 27 octobre 1782 de Antonio Paganini et de Teresa (née Bocciardo), amateurs de musique, Niccolò Paganini est familiarisé à la mandoline par son père, qui lui enseignera, à partir de 7 ans, le violon. Le jeune musicien se révèle très doué (il peut rapidement déchiffrer tout ce qu’on lui présente) et il commence à composer l’année suivante. Alors qu’il n’a qu’à peine 12 ans, il donne son premier concert en public (théâtre San Agostino), et peut entreprendre dès 15 ans une première tournée (Parme, Milan, Bologne, Florence, Pise et Livourne).
Beaucoup de professeurs se succédèrent au cours de la scolarité de Paganini. Le jeune élève étant un peu trop doué, beaucoup ne furent pas à la hauteur (Giovanni Servetto, violon maître de chapelle; Giacomo Costa, premier violon des principales églises de Gênes). D’autres estimaient n’avoir rien à lui apprendre dans la technique du violon, comme Alessandro Rolla à Rome, qu’avait conseillé à la famille du virtuose le marquis di Negro, ébahi par les prestations musicales de Niccolò. En plus du violon, Paganini reçut, de la part notamment de Gasparo Ghiretti et de son propre élève, Ferdinando Paër, des leçons de composition : harmonie, contrepoint et instrumentation lui sont enseignés trois fois par semaine par Paër pendant six mois environ.
On sait aussi que Paganini possède d’étonnantes facultés (on le soupçonna même, dans sa jeunesse, d’avoir conclu un accord avec le Diable en personne) : une ouïe incomparable, une sensibilité extrême à la musique, etc. Francesco Bennati, auteur d’une Notice physiologique sur Paganini (1831), a écrit : "La délicatesse de l’ouïe de Paganini surpasse tout ce qu’on pourrait imaginer. Au milieu de l’activité la plus bruyante des instruments de percussion de l’orchestre, il lui suffisait d’un léger toucher du doigt pour accorder son violon; il jugeait également, dans les mêmes circonstances, de la discordance d’un instrument des moins bruyants et cela, à une distance incroyable."
Mais, sous des apparences aussi studieuses, le musicien cache une autre facette : dès 16 ans, il est connu comme étant joueur, buveur et coureur de jupons...
Violoniste talentueux mais aussi guitariste de qualité (il écrit de nombreuses pièces pour violon et guitare), Paganini, au passage homme de scène, était capable d’alterner très rapidement (presque simultanément) les deux instruments lors de concerts à succès. Il s’attachait à conserver un certain mystère sur ses techniques de jeu et fut un des premiers musiciens à gérer sa carrière avec un sens certain de la publicité, comme ont pu le faire avant et après lui Thomas Arne ou Franz Liszt.
Du fait d’une hyperlaxité ligamentaire, ses mains, sans être plus grandes que la normale, sont dotées d’une extensibilité hors normes. Un contemporain les décrit ainsi : « Il imprimait aux premières phalanges des doigts de la main gauche qui touchait les cordes, un mouvement de flexion extraordinaire, qui les portait, sans que sa main ne se dérange, dans le sens latéral à leur flexion naturelle, et cela avec facilité, précision et vitesse. » Sa technique fait sensation dès son plus jeune âge.
Grâce à ses nombreux concerts (plusieurs centaines en quelques années) en Europe (à partir de 1831 à Paris puis Londres), il gagna plusieurs fois son propre poids en or. Ce qui n’avait jamais été réalisé.
Celle-ci est probablement une légende mais en dit long sur la fascination qu’il exerça. Lors d’un concert, il avait cassé trois cordes de son violon et n’en avait pas de rechange. Il n’en continua pas moins à jouer sur une seule corde avec une dextérité qui laissa perplexe et dans l’admiration tout son auditoire. L’origine de cette histoire se trouve probablement dans un défi que Paganini a relevé : écrire une œuvre sur la seule corde de sol (la plus grave). C’est la Mose fantasia (écouter la fin).
Gioacchino Antonio Rossini disait avoir pleuré trois fois dans sa vie : lors de l’échec de son premier opéra, au cours d’une promenade en bateau lorsqu’une dinde truffée tomba malencontreusement à l’eau, et enfin lorsqu’il entendit pour la première fois Paganini.
Liszt écrit de lui : « Quel homme ! Quel violon ! Quel artiste ! Quelle souffrance, quelle angoisse, quels tourments ces quatre cordes peuvent exprimer ! »
Deux rencontres marqueront sensiblement le musicien :
- Frédéric Durant (ou Duranowski), brillant violoniste polonais d’origine française, rencontré vers 1795.
- Il rencontre Hector Berlioz en 1833 après un voyage de ce dernier en Italie. Il lui commande un concerto pour alto qui sera en fait la symphonie concertante pour alto Harold en Italie (écouter un extrait du 3ème mvt). Cependant, jamais il ne jouera l’œuvre, jugeant la partie soliste trop effacée. Mais il fait à Berlioz un don de 20 000 francs (une fortune à l’époque), qui permet à celui-ci de se consacrer à la composition de Roméo et Juliette, dédiée à Paganini.
Atteint d’un cancer du larynx (d’où les dangers de l’alcool en grandes quantités, n’est-ce pas ?), Paganini meurt à Nice le 27 mai 1840 et sera enterré à Parme, en Italie. Ses compositions et, entre autres, les Vingt-quatre Caprices pour violon seul (écouter le début du n°13) contribuent à développer la technique de l’instrument : mélange du « pizzicato » et de « l’arco » (avec cette particularité de faire son pizzicato de la main gauche), les doubles harmoniques ou bien le jeu sur une corde (comme dans la Mose-Fantasia).
Catalogue et analyses, voir Wikipedia
Nombreux sont les violonistes qui, comme Paganini, ont été soupçonnés d’un pacte avec le diable pour expliquer leur extraordinaire virtuosité. Certains compositeurs ont abondé dans ce sens. Giuseppe Tartini (1692-1770) raconte, à propos de sa Sonate pour violon seul en sol mineur, surnommée Trilles Du Diable (écouter un extrait) : « J’ai rêvé une nuit que j’avais scellé un pacte avec le Diable pour le prix de mon âme. Tout obéissait à ma volonté, mon nouveau serviteur connaissait d’avance tous mes souhaits. Alors me vint l’idée de lui confier mon violon et d’attendre ce qu’il en tirerait. Quel ne fut pas mon étonnement lorsque je l’entendis jouer, avec un art consommé, une sonate d’une beauté telle que je n’aurais pu en imaginer de plus belle. J’étais stupéfait et charmé, le souffle court et je me réveillai. Je saisis alors mon violon et essayai de reproduire cette sonorité extraordinaire. En vain. La pièce que j’ai alors écrite est certainement une des plus belles que j’aie jamais composée ; elle reste cependant bien au-dessous de ce que j’avais entendu en rêve. »
Dans la tradition légendaire, le violon est souvent associé à Belzébuth comme dans la Danse macabre de Camille Saint-Saëns (écouter le début). C’est encore le cas au XXe siècle, dans l’Histoire du soldat d’Igor Stravinski (1882-1971) (écouter un extrait).