Pressé(e) ? Découvrez la biographie courte de Berlioz
Hector Berlioz est né le 11 décembre 1803, à La Côte-Saint-André, dans l’Isère. Il est descendant d’une vieille famille dauphinoise. Son père, Louis Berlioz, né en 1776, y travaille comme médecin et a épousé Antoinette-Joséphine Marmion. En 1809, le jeune Hector commence des études au séminaire. Celui-ci ferme en 1811. Son père décide alors de prendre en main lui-même la direction des études de son fils. Il lui enseigne donc la guitare et la flûte. En 1815, Hector tombe amoureux d’Estelle Duboeuf, une jeune fille âgée de 17 ans. Il commence la composition de quelques mélodies en 1816.
Parti à Paris en 1821 afin d’y commencer des études en médecine, il y suit des cours de littérature et se passionne pour la musique. Abandonnant la médecine, il se dédie entièrement à la musique et l’étudie au Conservatoire de Paris de 1823 à 1825 avec deux maîtres, Jean-François Le Sueur, un compositeur français, et Anton Reicha, un compositeur tchèque.
Ses premières compositions connues datent de 1818, mais c’est en 1824 que son génie s’épanouit vraiment avec la Messe solennelle, retrouvée en 1992 (écouter le début du kyrie) alors que Berlioz prétendait l’avoir détruite. Il s’avère en fait qu’il puisera dans ce génial coup d’essai la matière de nombreuses œuvres ultérieures, notamment la Symphonie fantastique, le Carnaval romain, le Requiem et le Te Deum.
En 1829, il publie Huit scènes de Faust et rencontre une jeune pianiste, Camille Moke. Tous deux tombent amoureux mais c’est en pensant à Harriet Smithson (qui l’a bouleversé comme actrice) qu’il compose la Symphonie fantastique.
Sous-titrée Épisode de la vie d’un artiste en cinq parties (écouter le 4ème mvt : Marche au supplice), la Symphonie fantastique est plus proche du poème symphonique que de la symphonie classique. Berlioz avait d’ailleurs prévu qu’un programme soit distribué à l’auditoire avant chaque exécution : il raconte le rêve d’un jeune musicien hanté par l’image d’une femme, être idéal symbolisé par une petite mélodie, l’idée fixe. Ce thème subit de multiples transformations au gré des péripéties (écouter la transformation de l’idée fixe dans chaque mvt). Au 4ème mouvement, l’artiste, désespéré, s’empoisonne à l’opium et délire. Il se voit condamné, conduit au supplice, exécuté, puis entraîné au sabbat dans une orgie diabolique.
Berlioz faisait alors suivre la symphonie par un monodrame intitulé Lélio qui terminait et complétait l’épisode de la vie d’un artiste. Tout au long de la représentation, l’orchestre était disposé sur la scène d’un théâtre, mais dissimulé derrière le rideau baissé. Aujourd’hui, on ne joue plus que la symphonie qui, comme l’auteur l’espérait, se passe largement de toute intention dramatique (écouter le début du 2ème mvt : Un Bal).
Composée en 1830, six ans seulement après la 9e symphonie de Beethoven, l’œuvre révolutionne l’orchestration par l’audace des effets (contrastes des nuances, spatialisation...) et l’utilisation des instruments dans le 5ème mouvement (effets de glissandi aux vents, jeu col legno, avec le bois de l’archet... : écouter). Berlioz n’a que 26 ans...
La même année, après 4 tentatives malheureuses, il obtient enfin le Prix de Rome avec La Mort de Sardanapale, une cantate qu’il juge pourtant « fort médiocre, ne représentant pas du tout ma pensée musicale intime. ».
Pour plus d’informations, voir notre dossier : Critique de la Symphonie fantastique par Schumann.
Grâce au prix de Rome il peut séjourner à la fameuse villa Médicis jusqu’en 1832. Mais il reçoit alors une lettre de Camille Moke qui lui annonce leur rupture et ses fiançailles avec un certain Pleyel. Vite remis, Hector Berlioz épouse en 1833 Harriet Smithson, l’actrice irlandaise qu’il avait déjà admirée dans les pièces de Shakespeare, surtout dans le rôle de l’héroïne de Roméo et Juliette, et qui lui avait inspiré la Symphonie fantastique.
Le couple s’installe à Montmartre. Leur fils Louis naît le 14 août 1834, pendant la composition de Harold en Italie, symphonie concertante commandée par Niccolò Paganini (écouter un extrait du 3ème mvt)... que le virtuose ne jouera jamais car l’œuvre ne le met pas assez en valeur. En 1836 puis 1837, Berlioz compose l’opéra Benvenuto Cellini, mal acueilli à Paris, d’où il tirera sa fameuse ouverture du Carnaval romain (1844 : écouter un extrait). En 1837, reconnu pour ses talents d’orchestrateur, il sollicite l’ouverture pour lui d’une classe d’orchestration auprès de Luigi Cherubini (1760-1842) qui est le directeur du conservatoire. Mais pour cet homme attaché aux règles, les idées de Berlioz sont trop révolutionnaires. Tout ce qu’il lui concèdera, c’est le poste de… bibliothécaire ! L’emploi est modeste, mais il permettra à Berlioz de remettre en lumière des compositeurs oubliés comme Jean-Philippe Rameau ou négligés comme Christoph Willibald Gluck. Sa version révisée d’Orphée et Euridice est encore jouée aujourd’hui. Il compose alors sur commande son Requiem ou Grande messe des morts (1837 : écouter le début). Malheureusement, Prosper, son petit frère, meurt en 1839. La même année, il achève un vieux projet, Roméo et Juliette, symphonie avec chant (écouter le début). Exécutée le 24 novembre 1839 au Conservatoire, elle remporte un grand succès et attire de nombreux auditeurs. En 1843 paraît le Traité d’instrumentation et d’orchestration modernes (seconde édition, revue et augmentée en 1855) qui inspira entre autres Gustav Holst, Vincent d’Indy ou Nicolaï Rimski-Korsakov (même Maurice Ravel, qui n’appréciait guère la musique de Berlioz, en possédait un exemplaire qui est toujours visible dans sa maison de Montfort-l’Amaury). En 1846, il termine La Damnation de Faust. La création en décembre à Paris est un échec qui provoque la ruine de l’auteur et son départ pour l’étranger. À Moscou, Berlin ou Londres, il la dirige avec succés.
Génie singulier et visionnaire au tempérament bouillonnant, Berlioz se retrouve bien isolé dans son pays. On lui préfère des musiciens aujourd’hui passés au second plan. Meyerbeer (1791-1864) et Ambroise Thomas (1811-1896) règnent sur le grand opéra, François Adrien Boieldieu (1775-1834) et Auber (1782-1871) sur l’opéra-comique, les salons succombent à la « pianomania » (Frédéric Chopin et Franz Liszt mais aussi Charles-Valentin Morhange, alias Alkan, ou Thalberg).
Bien qu’applaudi à chacune des manifestations qu’il organise, il reste incompris à Paris, sauf de Liszt, Chopin, Richard Wagner ou Paganini, qui lui commande un concerto pour alto (Harold en Italie). À partir de 1847, il parcourt l’Europe (Russie, Angleterre, Weimar, Berlin, Vienne, Prague) : partout, il organise des concerts où il fait entendre ses œuvres avec succès…nul n’est prophète en son pays !
Après la mort de son père en juillet 1848, Berlioz n’abandonne pas l’idée de séduire le public français, fusse au prix d’un stratagème. Ainsi, avant d’intégrer un chœur des bergers à son oratorio L’Enfance du Christ (1850-1854 : écouter le début), il l’attribue à un maître de chapelle du XVIIe siècle. Bien entendu, cette petite pièce remporte un franc succès… il raconte cette piquante anecdote dans ses Grotesques de la musique.
Sans illusion sur l’opinion du public à son égard, il note dans ses mémoires en 1854 : « Depuis trois ans, je suis tourmenté par l’idée d’un vaste opéra dont je voudrais écrire les paroles et la musique […] Je résiste à la tentation de réaliser ce projet et j’y résisterai, je l’espère, jusqu’à la fin. Le sujet me paraît grandiose, magnifique et profondément émouvant, ce qui prouve jusqu’à l’évidence que les Parisiens le trouveraient fade et ennuyeux. » Il ne résistera pas à l’envie d’écrire ce « vaste opéra » et achevera Les Troyens en 1858 (écouter le début). L’ouvrage dure quatre heures et il ne sera représenté que partiellement du vivant de l’auteur.
Le musicien doit ensuite supporter toute une série de malheurs : Harriet devient paralysée et aphasique suite à plusieurs attaques puis meurt (3 mars 1854) ; il subit lui-même des névralgies intestinales qui le poursuivront jusqu’à sa mort en le faisant souffrir atrocement ; sa sœur Adèle meurt en 1860… Hector épouse Marie Recio, une Espagnole qu’il a connue quelques années auparavant, mais elle décède en 1862…
Malgré ces coups du sort, Berlioz commence en 1860 sa dernière œuvre d’envergure, Béatrice et Bénédict opéra-comédie inspiré de "Beaucoup de bruit pour rien", de Shakespeare (écouter le début de l’ouverture). Il écrit à la fin de ses Mémoires : « L’œuvre n’exige aucune dépense pour la mettre en scène. On se gardera néanmoins de me la demander à Paris. On fera bien, ce n’est pas de la musique parisienne. » Terminée en 1862, il sera appelé en Allemagne pour la diriger à six reprises, toujours avec succès.
Il est fait, en 1864, chevalier de la légion d’honneur, et tombe à nouveau amoureux d’Estelle Duboeuf, qui refuse cependant d’épouser le musicien. En juin 1867, Hector apprend que son fils est mort de la fièvre jaune à la Havane. En juillet, il brûle des photos, des lettres... Il se retire à Nice mais en 1868, il contracte deux congestions cérébrales. Le 8 mars 1869, il meurt, âgé de 65 ans, après avoir perdu tous ses êtres chers les uns après les autres.
L’œuvre tout entière de Berlioz est tournée vers le grandiose et le spectaculaire, vers le « colossal, ninivite, babylonien », comme il l’écrit lui-même. Les pages intimes sont rares. Rien pour le piano et la musique de chambre, seulement des compositions lyriques et pour grand orchestre. Par exemple :
- la Symphonie funèbre et triomphale (1840 : écouter le début du 1er mvt), écrite pour un orchestre d’harmonie de 200 musiciens qu’il dirige sabre au clair dans les rues de Paris.
- le Tuba Mirum du Requiem (1837 : écouter un extrait) avec « l’explosion formidable » de ses quatre orchestres de cuivres placés aux quatre coins de l’orchestre principal, ses 8 paires de timbales, 2 grosses caisses, 10 paires de cymbales, 4 tam-tams.
- le grandiose final du Te Deum (1849 : écouter) avec ses 2 chœurs de 100 choristes chacun, un troisième chœur de 600 enfants, un orchestre de 200 instruments, et le grand orgue.
Échappant à toute école, la musique de Berlioz est d’une grande originalité et d’une invention constante. Le compositeur, très exalté dans l’exécution, reste cependant très rigoureux dans l’écriture. Éminent représentant du romantisme européen, il a longtemps été boudé en France. Surtout connu pour la Symphonie fantastique, ce sont divers chefs d’orchestre anglais comme Sir Thomas Beecham qui ont œuvré pour sa réhabilitation en enregistrant une grande partie de ses compositions.