Quand on évoque les scandales qui ont secoué le monde de la musique, le premier événement auquel on pense, c’est la création du Sacre du printemps, ballet composé en 1913 par Igor Stravinski pour la compagnie des Ballets russes de Diaghilev (écouter la fin) : consulter à ce propos cet excellent article de Télérama, ainsi que notre dossier Stravinski analyse son Sacre du Printemps.
L’objet de ce dossier est de présenter quelques-uns des scandales les plus retentissants qui ont éclaté à l’occasion de la création de compositions musicales novatrices. Le fait s’est souvent produit à l’insu (pour ne pas dire à la surprise) de l’auteur de l’œuvre jugée scandaleuse. Mais il a parfois été souhaité par ce même auteur, animé d’une volonté provocatrice.
Nous présenterons aussi dans ce dossier des canulars dont le but est le plus souvent de faire accepter au public une œuvre inconnue ou trop novatrice pour lui plaire d’emblée : c’est en quelque sorte un pieux mensonge. Le plus célèbre est sans doute l’adagio dit d’Albinoni, composé par un musicologue contemporain pour faire connaître le compositeur baroque Tomaso Albinoni.
Au début de l’expansion du christianisme, la musique liturgique prend des formes extrêmement variées, les fidèles exprimant leur foi de façon souvent très exubérante (un peu à la façon des gospels actuels). On comprend que, quand la messe se transforme en un véritable spectacle de music-hall, les autorités ecclésiastiques se fâchent et prennent le contre-pied. Ça n’est pas facile mais elles parviennent finalement au IXe siècle à imposer dans toute la chrétienté un même style beaucoup plus calme : le chant dit « grégorien ». Il faut dire qu’elles bénéficient alors du soutien de Charlemagne, qui voit dans cette pratique religieuse partagée par tous, un excellent moyen de souder entre eux les différents peuples composant son empire.
L’élan est ainsi donné pour plusieurs siècles à une musique religieuse austère dont les inflexions épousent étroitement le texte de la prière (écouter un Agnus Dei). Ce style de chant monodique a cappella traduit parfaitement l’expression d’une profonde spiritualité. Elle exclut tout ce qui peut perturber la méditation des fidèles : envolées lyriques, ornements et mélismes trop décoratifs, accompagnement instrumental. Non contente de proscrire tout ce qu’elle juge trop séducteur dans la musique sacrée, l’Église tente aussi de régenter la musique profane en menaçant les ménestrels de l’enfer. Encore au XVIe siècle, l’Inquisition d’Espagne interdit la Sarabande tant elle la juge « capable d’émouvoir les passions tendres, de dérober le cœur par les yeux, et de troubler la tranquillité de l’Esprit ». D’une façon générale, les religions n’ont jamais vu la musique d’un très bon œil, les courants les plus extrémistes allant jusqu’à l’interdire complètement !
Au XIVe siècle, dans un contexte pour le moins perturbé (covi peste noire, Guerre de Cent Ans puis Grand Schisme d’Occident), les musiciens remettent en question le style ancien qualifié « d’Ars antiqua » et, malgré l’opposition de l’Église, osent des recherches polyphoniques et rythmiques qu’ils nomment Ars nova. Ce courant novateur audacieux (qui fait le désespoir des autorités religieuses) est notamment illustré par Guillaume de Machaut, qui juge la religion mieux servie par un contrepoint polyphonique riche et vivant. Sa Messe de Notre Dame, dite de Tournai, révolutionne le genre (écouter l’Agnus Dei).
C’est encore de l’Eglise que vient le scandale au XVIe siècle, mais pour de tout autres raisons que musicales. Il vient du commerce des indulgences, attestations vendues par le clergé en rémission des péchés. Martin Luther, scandalisé par de telles pratiques, seulement destinées à enrichir l’Eglise, lance un grand mouvement de Réforme qui aboutira au développement de la religion protestante. Le clergé catholique, pour réagir aux critiques dénonçant la corruption de l’Église, déclenche alors un mouvement de contre-réforme. Réunis au Concile de Trente, les participants prennent la mesure des changements nécessaires, y compris dans le domaine de la musique. Les nouveautés introduites par l’Ars nova sont remises en question (il est vrai qu’on ne comprenait plus grand-chose aux paroles des prières) : certains réclament même le retour à la simplicité du chant grégorien. On n’ira pas jusque-là mais, pour préserver l’intelligibilité du texte, le style polyphonique religieux est simplifié : on adopte une écriture verticale, uniquement chorale, où chaque accord correspond à une syllabe du texte. C’est notamment Giovanni Pierluigi da Palestrina qui y parvient le mieux : écouter le motet O bone Jésu). Ses chants seront si bien interprétés par les chœurs de la Chapelle Sixtine de Rome que l’expression a cappella restera pour désigner la musique chorale sans instruments.
À la charnière des XVIe et XVIIe siècles, c’est cette fois un scandale purement musical qui agite le monde culturel : on s’était habitué à l’écriture polyphonique (éventuellement avec ses excès), et voilà que des compositeurs avant-gardistes se permettent de lui substituer un nouveau style : une « monodie accompagnée » par le continuo (ou basse continue, ou basse chiffrée). Ce stile nuovo provoque la stupeur des auditeurs et la fureur des puristes. Cette fois, ce n’est plus l’intelligibilité des paroles qui est en cause, mais les libertés prises avec le langage traditionnel. À tel point que dans la préface de son cinquième livre de madrigaux, Claudio Monteverdi préfère se justifier pour couper court aux critiques : « Certains en seront peut-être surpris, ne s’imaginant pas qu’il puisse exister d’autres pratiques que celle enseignée par Zarlino. Mais, en ce qui concerne les consonances et les dissonances, il y a un autre point de vue que la tradition : celui justifié par la satisfaction de l’ouïe et de la raison. » Son madrigal espressivo Le Combat de Tancrède et Clorinde exprime les passions avec une rare intensité (écouter un extrait).
Abordons maintenant la période du baroque tardif (début du XVIIIe siècle). S’il est un compositeur qui semble loin de toute polémique, c’est bien Johann Sebastian Bach. Il fut pourtant un jeune homme impétueux qui a créé le scandale par ses improvisations audacieuses pendant le service religieux. Le Consistoire d’Arnstadt déplorait à l’époque « les nombreuses et curieuses variations dans ses chorals, mêlés d’accords étranges, qui embrouillent l’assemblée des fidèles ». Ses spectaculaires pièces d’orgue comme la Toccata et fugue en ré m datent de cette époque : écouter la Toccata.
En plein siècle des « Lumières », à Paris, les grands esprits se disputent sur le terrain de la vie musicale. La polémique oppose les défenseurs de la tradition héritée de Jean-Baptiste Lully (groupés derrière Jean-Philippe Rameau), et les partisans d’une ouverture au goût italien (réunis autour du philosophe Jean-Jacques Rousseau). Le scandale arrive avec l’arrivée en 1752 d’une troupe itinérante italienne venue donner à Paris La serva padrona (La Servante maîtresse) de Giovanni Battista Pergolèse Les auditeurs sont séduits par la légèreté et la simplicité de l’œuvre : écouter le début. S’ensuivit la violente et célèbre querelle des bouffons, bataille de pamphlets qui divisa pendant deux ans l’intelligentsia parisienne.
À partir de 1860 naît une autre querelle musicale, mais en Allemagne cette fois. Elle oppose ceux qui, à la suite de Franz Liszt et Richard Wagner, prônent ce qu’ils appellent la « musique de l’avenir » (Zukunftsmusik) : ils défendent une conception « littéraire » de la musique qui repose sur des formes libres comme le poème symphonique et le drame en musique où le texte est servi par un flot musical continu. Les opposants à cette conception sont des adeptes de la musique pure, c’est-à -dire attachée à la tradition. Ils choisissent comme référence le compositeur Johannes Brahms (1833-1897). Son but est en effet de créer une « musique durable » (dauerhafte Musik), qui s’enracine dans le passé et laisse une impression d’équilibre et de solidité. Chez lui, rares sont les formes libres (ballade, rhapsodie, fantaisie...), car il préfère composer dans le cadre rassurant des formes classiques : quatre symphonies, deux concertos pour piano, un pour violon, sonates, quatuors.... Par la suite, la querelle s’envenima et ses protagonistes, bien que tous passionnés de musique, restèrent définitivement fâchés !
On connaît l’aversion de Claude Debussy pour « cet insupportable Wagner qui nous a infligé Wotan, le majestueux, le vide, l’insipide Wotan !... » (extrait d’une interview par Paul Landormy). Son rejet s’étend à la musique allemande en général dont il refuse la lourdeur et les formes qui contraignent le compositeur à avancer selon un schéma fixe et prédéfini. En plein concert, il s’exclame ainsi : « Au secours ! Il va développer ! ». Lors de la première à Paris de la Symphonie n° 2 de Mahler (écouter le début du premier mouvement), il quitte ostensiblement la salle et écrit le lendemain : « Ouvrons l’œil (et fermons l’oreille)… Le goût français n’admettra jamais ces géants pneumatiques à d’autre honneur que de servir de réclame à Bibendum. ».
Debussy ne craignait pas de créer le scandale en fustigeant la musique allemande pourtant très appréciée par la plupart de ses collègues. Mais c’est lui-même que le scandale rattrape quand il présente son opéra Pelléas et Mélisande à la salle de l’Opéra-Comique de Paris (écouter le début). Au cours des répétitions, les difficultés s’accumulent : polémique avec Maeterlinck qui veut imposer sa maîtresse pour chanter Mélisande (il faillit même provoquer Debussy en duel), sabotage des partitions rendant impossible la différenciation des # et des b (vicieux, ces saboteurs), pamphlet contre l’ouvrage rebaptisé Pédéraste et Médisante.... La première est un échec désastreux car la musique singulière et le rythme extrêmement lent de l’opéra déconcertent le public et une partie de la critique (écouter la Scène de la Tour). Les représentations suivantes feront justice à l’œuvre.
Le scandale le plus retentissant du XXe siècle est à coup sûr celui qui a lieu en mai 1913, à la création par les Ballets russes du Sacre du printemps. La chorégraphie de Nijinski, tout comme la musique d’Igor Stravinski, en plaçant le rythme comme élément principal de l’œuvre (voir une reconstitution du ballet original), provoquent un chahut mémorable (ses détracteurs qualifient l’œuvre de « Massacre du printemps »). Toutefois, la veille, la générale s’était déroulée dans le calme, en présence de Debussy, de Maurice Ravel et de nombreux autres intellectuels, ainsi que de la presse parisienne. Le compositeur décrit ainsi la représentation dans ses Chroniques de ma vie : « [J’ai] quitté la salle dès les premières mesures du prélude, qui tout de suite soulevèrent des rires et des moqueries. J’en fus révolté. Ces manifestations, d’abord isolées, devinrent bientôt générales et, provoquant d’autre part des contre-manifestations, se transformèrent très vite en un vacarme épouvantable. »
C’est avant tout la chorégraphie de Nijinski qui met le feu aux poudres, suscitant exclamations scandalisées ou ricanements grinçants. Le lendemain de cette mémorable soirée, Adolphe Boschot, dans le journal « L’Écho de Paris », ironise sur les « bonnets pointus et les peignoirs de bain » dont sont affublés les danseurs « qui répètent cent fois de suite le même geste : ils piétinent sur place, ils piétinent, ils piétinent et ils piétinent, Couic : ils se cassent en deux et se saluent. Et ils piétinent, ils piétinent, ils piétinent, Couic » Plus loin, il déplore une « pose tortionnaire » et un « unanime torticolis » ! D’autres scandales se sont enchaînés ensuite.
Le début du XXe siècle est en effet fertile en œuvres qui ont déclenché les passions à leur création. Citons par ordre chronologique :
- l’opéra Salome composé par Richard Strauss en 1905, condamné pour la violence et la sensualité du livret : l’érotisme atteint son comble avec la Danse des sept voiles, que certaines chanteuses n’hésitent pas à exécuter jusqu’à la nudité complète (je prédis un taux de clic record sur ce lien).
- le cycle de Lieder Pierrot lunaire d’Arnold Schönberg en 1912, qui crée le scandale par l’usage révolutionnaire de la technique du parlé-chanté (sprechgesang : écouter le début),
- le « ballet réaliste » Parade, d’Erik Satie en 1917, qui choque par les costumes de Picasso et la chorégraphie de Massine (reconstitution du ballet d’origine).
- le ballet Le Mandarin merveilleux, de Béla Bartók en 1924, créé en 1926 à l’opéra de Cologne. Par son sujet érotique, il crée un tel scandale qu’il est retiré de l’affiche et sera interdit en Hongrie. Pour couper court à toute polémique, l’auteur préfère le transformer en une suite d’orchestre (écouter le début).
- L’étrange pièce Déserts composée par Edgar Varèse en 1954, qui choque par sa brutalité et le mélange d’instruments traditionnels (vents, percussions, piano) avec des sons électroniques. Créée au théâtre des Champs-Élysées à Paris, elle déclenche un tel tumulte qu’elle devient inaudible. Le lendemain, un critique écrit : « Ce M. Varèse devrait être fusillé séance tenante. Et puis non, ça ferait encore du bruit, il serait trop content. C’est la chaise électrique qui convient à cet « électrosymphoniste »… » (écouter un extrait).
Le Pierrot lunaire était un coup d’essai. Schönberg continue à susciter le scandale avec ses musiques dodécaphoniques puis sérielles. L’Europe musicale se divise en atonalistes et anti-atonalistes, ces derniers n’hésitant pas à perturber des concerts et à demander le renvoi de Schönberg de sa chaire de professeur. Pourtant, son influence a été déterminante chez beaucoup de compositeurs des générations suivantes, suscitant même des attitudes extrêmes. Cette déclaration du jeune Pierre Boulez des années 1950 en offre un exemple : « Tout musicien qui n’a pas ressenti la nécessité du langage dodécaphonique est INUTILE. Car toute son œuvre se place en deçà des nécessités de son époque ».
L’heure des scandales provoqués par des œuvres semble bien révolue. Mais on ne peut clore ce chapitre sans évoquer des polémiques d’une autre nature : celles provoquées par des mises en scène d’opéra particulièrement déroutantes. On consultera à ce propos un excellent article de France-Musique.
Il ne faut pas confondre le canular (qui est une forme de tromperie plus ou moins amusante), avec la plaisanterie musicale (qui ne dissimule pas son ambition au public : voir notre dossier Humour et musique qui en présente de nombreux exemples). Le canular est souvent drôle, mais c’est d’abord un subterfuge qui a essentiellement comme but de faire accepter au public ce qu’il ne serait pas prêt à recevoir d’emblée : on a déjà évoqué dans le préambule l’Adagio d’Albinoni, mais citons d’autres exemples.
Un autre genre de tromperie a souvent été pratiqué par des éditeurs peu scrupuleux : ils n’ont pas hésité à attribuer une partition à un compositeur connu pour mieux vendre l’œuvre d’un inconnu. C’est ainsi que Nicolas Chédeville (1705-1782) a fait passer pour du Vivaldi son recueil Il Pastor Fido de six sonates pour la musette ou la flûte : écouter un extrait.
L’intention d’Hector Berlioz était plus louable. Connaissant les préventions du public parisien à l’égard de son œuvre, il a fait passer un chœur des bergers de son oratorio L’Enfance du Christ (1850, écouter) pour l’œuvre d’un maître de chapelle du XVIIe siècle. Constatant le succès unanime rencontré par cette page, il a révélé qu’il en était l’auteur. Il avait prouvé que son œuvre méritait d’être écoutée par le public avec une autre oreille.
Pour rendre la supercherie plus crédible, Berlioz n’avait pas été avare de détails. Il avait attribué la pièce à un certain Pierre Ducré, « maître de musique à la Sainte-Chapelle de Paris ». Il l’avait datée de 1679 et ajouté dans le programme : « C’était écrit sur parchemin en vieille notation que j’ai eu beaucoup de peine à déchiffrer ». Comment ne pas être convaincu par un tel luxe de précisions ?
Au début du 20ème siècle, le violoniste virtuose Fritz Kreisler (1875-1962) fait figurer à ses concerts de petites pièces de grands compositeurs : Vivaldi, Couperin, Gaetano Pugnani (écouter)… Quand on découvre que ces œuvres sont en réalité écrites par Kreisler lui-même, il répond qu’il serait « impudent et maladroit de répéter [son] nom sans cesse sur les programmes. » Quelle modestie ! Il avait pourtant réussi avec talent à tromper tout le monde !
Autre canular fameux qui nous vient du Japon. Pendant vingt ans, Monsieur Samuragochi s’est fait passer pour un compositeur sourd. Surnommé le « Beethoven japonais », il faisait l’admiration du monde musical par la puissance et la complexité de ses compositions (écouter un exemple). Son étoile a pâli quand on a découvert en février 2014 qu’il n’était ni sourd ni l’auteur de « ses » œuvres. Elles étaient en réalité la production talentueuse d’un modeste professeur de musique, Monsieur Niigaki. Mais évidemment, c’était moins vendeur que la jolie histoire racontée par ce nouveau Beethoven.
Moins poétique mais plus amusant est ce canular mis au point en juin 1961 par la radio anglaise BBC. Le speaker présente avec force détails une œuvre de Piotr Zac, jeune compositeur polonais qui promet. Elle s’intitule Mobile tape and percussion et, selon le présentateur, se situe à mi-chemin entre Cage et Stockhausen (écouter le début). En fait, on apprendra deux mois plus tard que cette soi-disant « œuvre novatrice » avait été produite par deux comparses qui, pour faire croire à une musique expérimentale, avaient frappé sur tout ce qui leur tombait sous la main dans le studio. La radio avait démontré aux critiques crédules que, sous couvert de musique d’avant-garde, on pouvait leur faire accepter n’importe quoi !
Facile, direz-vous, d’abuser les auditeurs quand il s’agit de musiques nouvelles. Mais l’expérience prouve que de tels canulars fonctionnent aussi avec la musique ancienne. Par exemple, dans les années 1990, Michel Winfried a prétendu avoir retrouvé le manuscrit perdu de six sonates de Joseph Haydn. Il les a soumises à d’éminents musicologues qui se sont extasiés sur la prétendue découverte. Il a révélé alors que c’était lui qui les avait écrites, ce qui souligne encore une fois la relativité des jugements de valeur portés sur l’authenticité des œuvres.
Ce genre de canular pose en fait une question importante : peut-on se permettre de juger une démarche qui se veut d’avant-garde ? Car on serait tenté de considérer que bien des œuvres d’un musicien comme John Cage semblent plus tenir du canular (voire de la fumisterie) que d’une proposition sérieuse. C’est aussi le cas de beaucoup de créateurs qui, en leur temps, ont dérouté, voire scandalisé, leurs auditeurs au point d’être rejetés dans le « n’importe quoi » voire l’anti-art. Citons notamment : Erik Satie, Charles Ives, Edgar Varèse, Luigi Russolo, Henry Cowell, Alexandre Scriabine, George Antheil, Pierre Henry, Karlheinz Stockhausen, Mauricio Kagel, etc. On pourrait y ajouter le facétieux György Ligeti, auteur du Poème symphonique pour 100 métronomes, qui est un pied de nez à l’intelligentsia avant-gardiste dont il fait d’ailleurs partie (visionner la vidéo).
La question est d’autant plus délicate que beaucoup de compositeurs qui ont subi les foudres de leurs contemporains sont aujourd’hui unanimement reconnus. Les critiques se sont si souvent ridiculisés par le passé que bien peu aujourd’hui osent se permettre un quelconque jugement négatif sur les compositeurs les plus audacieux. La règle actuellement est d’attendre que le temps fasse son œuvre pour séparer le bon grain de l’ivraie, et faire la différence entre une recherche prémonitoire et un essai sans avenir : voir le chapitre sur l’œuvre du temps dans notre dossier Qu’est-ce que le génie ?